Mathias Thépot | 19/03/2013
Les prix de l'immobilier dans la péninsule ont connu en 2012
le recul le plus important de ces dernières années avec une chute moyenne de
13,7%. Il faudra encore au moins une décennie pour que les stocks de logements
invendus s'écoulent et que le marché retrouve une activité normale.
Profondément affaiblie par les déboires de son secteur
immobilier, l'Espagne traverse une période insupportable. L'éclatement de la
bulle immobilière, qui a pu être qualifiée de miracle économique par certains
jusqu'en 2008, détruit tout sur passage. L'Espagne compte désormais plus de 700
000 logements invendus alors que la demande est au plus bas. Le retour à la
normale prendra du temps.
En 2012, les prix de l'immobilier ont subi le recul le plus
prononcé de ces dernières années à - 13,7%, avec - 12,3% dans le neuf et -
14,8% dans l'ancien. Ce, après des baisses de 7,4% en 2011, 2% en 2010, 6,7% en
2009 et 1,5% en 2008. Jesus Castillo, économiste chez Natixis, prévoit que la
chute des prix s'établira en 2013 à 9% et à 5% en 2014. L'agence de notation
Standard & Poor's anticipe pour sa part une baisse de 7,8% en 2013 et de 6%
en 2014.
Une décennie d'ajustement
Mais quelle que soit l'ampleur de la baisse des prix à moyen
terme, "il y aura très probablement une décennie d'ajustement sur le
marché de l'immobilier espagnol avant que les stocks de logements invendus
s'écoulent et que le marché immobilier retrouve un fonctionnement normal",
estime Jesus Castillo. En effet, en 2012, un peu moins de 160 000 transactions
de logements neufs se sont opérées, alors qu'en parallèle, 140 000 logements
ont été livrés sur le marché. À ce rythme, le stock de 700 000 logements vides
n'est donc pas prêt de se réduire.
La "bad bank"
doit liquider
Pour remédier à cette situation, le gouvernement espagnol va
s'appuyer sur une "bad bank". Créée récemment, elle a recueilli un
peu moins de 40 milliards d'euros d'actifs immobiliers des banques les plus en
difficultés, et a pour objectif de liquider ses stocks. "La bad bank
est aujourd'hui le plus important agent immobilier en Espagne", indique
Jesus Castillo. Elle a pu récupérer les actifs immobiliers à prix bon marché
pour pouvoir les revendre sans subir de décote. Mais elle ne peut malgré tout
pas vendre trop vite et à prix trop bas, car elle déstabiliserait alors
d'autres banques qui ont décidé de garder de l'immobilier à leur bilan.
"Si la band bank vend les actifs qu'elle a repris à un prix trop bas, les
autres banques -qui restent fragiles- vont voir les actifs immobiliers qu'elles
portent se déprécier", explique Jesus Castillo.
Une demande durablement
affectée
L'activité de la "bad bank" sera bien le seul signe
annonciateur d'un réajustement du marché. Car coté demande, le pire est à
venir. "La demande en Espagne est durablement affectée. Le taux de chômage
augmente, les salaires baissent, les ménages doivent se désendetter et la
pression fiscale est importante et durable au regard du processus
d'assainissement budgétaire en cours. Ce, alors qu'en parallèle les banques
sont en pleine restructuration et restreignent les conditions d'accès aux
crédits", constate avec crainte Jesus Castillo.
Les chiffres parlent d'eux même : le taux de chômage en
Espagne atteint 27%, et 14% des ménages ont l'intégralité de leurs membres au
chômage. Il n'est donc pas surprenant de constater que seuls 191 000 nouveaux
ménages se sont formés en 2012, contre 460 000 en 2008.
Un parc locatif quasi-inexistant
La solvabilité des Espagnols est clairement au plus mal. Et
ce n'est pas le parc locatif existant qui pourra leur donner de l'air. Lui qui
ne représente même pas 15% du parc de logements du pays. La faute à la mise en
place depuis des décennies d'avantages fiscaux qui incitaient à acquérir plutôt
qu'à louer. Ce qui a endetté durablement la population.
Enfin, seul un nombre très faible de ménages en capacité
d'accéder aux bassins d'emplois de quelques grandes métropoles pourront, s'ils
n'ont pas émigré, faire subsister une demande de logements. Ils devraient au
moins permettre de maintenir à l'avenir l'activité de construction à son faible
niveau de 2012.
Source : latribune.fr
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